2024-06-28 20:14:27
Ici, vivaient dans un passé récent plusieurs ministres de la République et ce quartier huppé était connu pour ses voies bien tracées, bitumées qui donnaient une fière allure au quartier. Lointains souvenirs pour les habitants restés sur place. Désormais, ces infrastructures routières sont l’ombre d’elles-mêmes et la rue est dans un état de dégradation très avancée.
Le bitume a foutu le camp sur une bonne partie de la voie, laissant la place à une mare de boue de couleur marron. Nombre de personnes pensent que ce sont les inondations répétitives des lieux qui ont eu raison du bitume. « Ces différentes intempéries ont emporté le bitume qui jusqu’à aujourd’hui n’a pas été réparé », soutient Christian Brou, un riverain.
Il est 7 heures 30 minutes, quand Marc Diallo, cadre de banque dans un établissement de la place, quitte son domicile situé dans le sous- quartier Rosiers Programme 3 de Cocody-Riviera. Ce père de famille, la trentaine révolue, teint d’ébène bien soigné et du haut de ses 180 cm, prend place à bord de sa voiture, une grosse cylindrée.
En partance pour son travail au Plateau, il fait un détour pour déposer sa fille de 4 ans à son école, le Groupe scolaire La Palmeraie. Dans le véhicule qu’il conduit vers l’école de sa fille, il devient inquiet alors qu’il s’approche du Carrefour Guiraud. Sa mine commence à se renfrogner. C’est que, M. Diallo doit affronter plusieurs obstacles en ce lieu. « Ma voiture étant basse, ma hantise, ce sont les nids de poules, les faïençages et les affaissements de la tranchée causée par les multiples érosions », explique-t-il après un long soupir.
Sur cette voie, passagers et conducteurs entendent à plusieurs reprises les bruits désagréables, ces ‘’ couac ! couac ! ’’ qui proviennent du dessous des véhicules qui affrontent les trous et les crevasses. « C’est toujours comme ça quand je viens déposer ma princesse. C’est un véritable parcours du combattant », fait savoir M. Diallo d’un ton impuissant.
Avant de souligner qu’il ne sait plus quoi faire face à cette situation qui perdure depuis quatre ans, sans réparation : « Ma voiture m’a coûté énormément d’argent et avec l’état des routes, c’est très difficile pour moi car une voiture est comme un humain. Je dois l’entretenir et ce n’est pas chose aisée, avec le coût de la vie à Abidjan. Lorsqu’il pleut, elle doit aller faire une visite technique car les jantes sont importées mais bon bref », ajoute-t-il, désespéré.
Pour lui, la solution alternative pour ne plus avoir à affronter ces routes dégradées est de faire changer d’école à sa fille. Mais, le hic, c’est son établissement actuel est proche de la maison.
Au niveau du Carrefour après Barrage, aux environs de 17 heures une jeune dame en uniforme jupe crayon gris, chemise mouillée, veste et cravate frappées du macaron d’une célèbre grande école privée située dans au Plateau, revient sans doute des cours. Ericka Kouakou, étudiante en deuxième année de finance et comptabilité, cherche en vain un taxi pour rentrer chez elle.
L’opération n’est pas chose aisée à ces heures de pointe à cause des embouteillages, mais surtout en raison de la dégradation des voies. Les chauffeurs taxis et autres transporteurs en commun ne veulent pas s’aventurer sur ces routes dégradées.
« Depuis 16 heures je suis arrêtée sous la pluie, et il est presque 18 heures. Je suis bloquée au carrefour ici. Les chauffeurs de taxi refusent de partir. Je veux commander un Yango aussi, mais les prix sont exorbitants », affirme Ericka, déboussolée.
Après deux heures d’attente, un taxi-compteur accepte de conduire la jeune étudiante chez elle. Ce chauffeur, c’est Elvis Kouao, qui conduit les taxis depuis plus de 20 ans : « Je ne voulais pas prendre l’étudiante dans ma voiture mais je suis un père de famille. Elle m’a dit qu’elle avait un examen demain. Je ne peux pas rester indifférent », déclare-t-il, compatissant.
Kouao explique qu’il refuse catégoriquement les clients à destination de Carrefour Guiraud et de Rue Ministre. Mais s’il accepte la course, c’est que le client aura à débourser le double, voire le triple du tarif normal. Après un moment de silence, il souligne : « Nous sommes dans un quartier huppé. Si c’était Abobo, j’allais comprendre mais là vraiment ».
Au sein de son bureau, dans sa résidence de Cocody au sous-quartier des Rosiers Programme 6, Kouakou Martial, sexagénaire, laborantin de son état à la retraite, identifie les causes de la dégradation des routes dans les quartiers d’Abidjan : « La dégradation des routes à Abidjan peut être attribuée à plusieurs facteurs. D’abord, l’absence d’entretien régulier et adéquat contribue à l’usure prématurée de la chaussée. De plus, les conditions météorologiques extrêmes, telles que les fortes pluies et les températures élevées, peuvent endommager les routes, en particulier celles qui ne sont pas correctement drainées ou revêtues. Enfin, le trafic intense et la surcharge des véhicules peuvent également accélérer la détérioration des routes, en particulier dans les zones fortement urbanisées ». Avis de connaisseur confiant.