2024-04-22 07:36:08
Embouteillages interminables, coups de klaxons, difficiles manœuvres pour les automobilistes qui tentent de se tirer d’affaire. La circulation est dense sur l’Avenue 16 de la commune de Treichville, au d’Abidjan, à 11 h 30, ce mercredi. Le désordre règne en maitre sur la route. En raison de la panne des feux de signalisation au carrefour, chacun se débrouille comme il peut pour sortir du guêpier.
C’est le cas de Bakary Sidibé, 40 ans. Au volant de son mini car communément appelé « Gbaka » chargé de passagers, le chauffeur ne cesse de grogner, coincé au niveau de la gare de Bassam : « Normalement, je fais une recette quotidienne de 50.000 FCFA mais à cause des feux tricolores en panne qu’on rencontre à chaque carrefour, notre recette baisse. Je me retrouve ces jours-ci avec 30.000 F au maximum. Pourtant, nous savons tous que la vie est chère, c’est compliqué pour nous. Des fois, la recette fixée n’est pas atteinte. Dans ce cas, nous sommes obligés de compléter avec notre argent pour ne pas que le propriétaire de la voiture se fâche et décide de nous l’arracher ».
Cette situation pousse souvent ces chauffeurs à faire table-rase du code de la route en mettant leur sécurité et celle de leurs passagers en péril pour obtenir la recette quotidienne fixée, peu importe le degré d’embouteillages occasionnés par la défaillance des feux tricolores : « Quand les feux tricolores sont en panne comme à l’avenue 16 actuellement, nous sommes obligés de prendre les bretelles, d’emprunter les voies dans les quartiers. Nous sommes même parfois contraints de prendre des sens interdits pour aller rapidement. Où tu ne dois pas passer, tu es obligé de passer par là pour gagner en temps et satisfaire le client », confesse Adama Bamba, chauffeur de VTC « Yango ».
Si les feux tricolores en mauvais état ont des effets négatifs sur les chauffeurs de véhicules de transport en commun, ils sont encore plus néfastes pour les livreurs des différentes communes de la ville d’Abidjan.
Sur sa moto de livraison, coincé entre les véhicules, le jeune livreur Séka Yannick est inquiet. Il doit livrer plusieurs colis dans des endroits différents. Malheureusement, pris dans un embouteillage dans les environs de l’avenue 16 de Treichville, il ne peut ni avancer, ni reculer. Le désespoir peut se lire sur son visage. Il ne cesse de fixer l’heure sur la montre à son poignet. « Quand nous ne gagnons pas en temps, cela cause un trou dans la recette du jour. C’est ainsi que fonctionne notre travail. Plus on est rapide, plus on capitalise. Mais la défaillance des feux tricolores peut nous ralentir dans notre mission de livreur. C’est quasiment impossible qu’on gagne notre recette quotidienne dans ces conditions », se plaint le livreur.
Joël Mabéa est sur sa moto Apsonic noir, casque sur la tête et son le téléphone n’arrête pas de sonner depuis un moment. Cet autre livreur transpire à grosses gouttes et commence à perdre patience. Il répond à l’appel d’une cliente et devient automatiquement nerveux après le coup de fil : « Quand un feu tricolore est en panne à un carrefour, c’est un désastre parce que nous avons du mal à circuler librement et nos clients se plaignent de la lenteur de la livraison sans tenir compte des entraves que nous rencontrons dans la ville. C’est écœurant de savoir que notre travail n’est pas efficace pour des raisons qui ne dépendent pas de nous », déplore-t-il.
Autre lieu, mêmes difficultés. Dans la commune de Marcory (Sud d’Abidjan), au carrefour du Camp Commando, transporteurs et livreurs sont tous confrontés à la défaillance des feux tricolores et l’impact de ce mal se fait ressentir sur leurs recettes journalières.
Chauffeur de voiture en commun, Cheick Karamoko, représentant des transporteurs de la commune lâche : « C'est mauvais, même très mauvais. Quand les feux fonctionnent, il y a déjà des embouteillages, mais quand ils sont en panne, c’est pire. Le trafic devient chaotique, surtout ici à Marcory, aux heures de pointe. Nous avons un feu en panne au carrefour depuis des années. Nous l’avons surnommé « le carrefour feux gâtés ». Cela nous met dans une situation difficile. Au lieu de cinq voyages prévus par jour, nous ne pouvons qu’en faire trois à cause des embouteillages. Cela signifie moins de revenus pour nous. Quand le trafic est fluide, nous pouvons repartir avec 35 000 F, mais lorsqu’il est perturbé, nous repartons avec seulement 20 000 F. C'est vraiment compliqué ». Dans ces cafouillages, les motards, eux, essaient d’emprunter les trottoirs destinés aux piétons, créant d’autres difficultés dans la circulation.
Pour Fall Asperge, chauffeur de VTC résidant à Marcory, la recette quotidienne est loin d’être gagnée. Il s’en plaint : « Cette situation me fatigue beaucoup. On ne peut pas bien travailler. Vraiment, On ne peut pas ! Tout le monde est pressé, et on perd du temps. Quand je vois ces embouteillages, je double le tarif pour pouvoir combler le vide mais malgré cela, je ne m’en sors pas parce que ça me prend toute ma journée. En fin de compte, on doit déduire l’argent du carburant, sans compter que le véhicule ne nous appartient pas et qu’on doit rendre compte au propriétaire. C’est désolant pour nous ».
Feux tricolores en panne, mauvaises recettes à cause des embouteillages. Tel est le quotidien des transporteurs freinés et limités dans tous les quartiers de la ville d’Abidjan.