Dans le quotidien contrasté des petits agents du privé


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Par Brigitte KOMONDI
Mis à jour le 2024-01-21 22:14:44

« A la fin du mois de mars, lorsque mon virement est passé, j´ai constaté que mon salaire avait augmenté de 75 000 FCFA », raconte Lamoussa Sawadogo débout au milieu de la pièce, un léger sourire aux lèvres.


 En ce début d’après-midi du 17 mai 2023, au sein de cette multinationale spécialisée dans le transport et la logistique, l’homme de 45 ans, vêtu d’un uniforme gris assorti de jaune, s’occupe de la propreté des 25 bureaux des deux directions Commercial/Marketing, et communication/Développement durable.

Du lundi au vendredi, il balaie le sol, l’essuie pour astiquer les mobiliers de bureau. « J’ai été mis en service ici depuis 2015 par une agence de prestation de service. Dans mes débuts, mon salaire était de 60 000 FCFA payé par virement bancaire », déclare Sawadogo. Il s’attelle à terminer le ménage du dernier bureau qui doit accueillir ses occupants. Il passe les derniers coups de balai.

    Quelques mois plus tôt, Lamoussa Sawadogo avait entendu parler de l’augmentation du salaire mais ne savait pas que cela le concernait. « A la mi-janvier, pendant que je faisais le service dans le bureau de l’équipe chargée de la cotation de la direction commerciale, j’ai surpris une conversation entre mes chefs qui disaient qu’il y aurait une augmentation du salaire dans les jours suivants. Je pensais que cette augmentation ne concernait que les cadres et les patrons mais pas nous qui balayons les bureaux », indique-t-il tout enthousiaste avant d’ajouter : « Toute ma vie a changé ».

   Renseignements pris auprès de son agence de placement, il a su que cela fait suite à la revalorisation du Smig décidé par le gouvernement ivoirien en Conseil des ministres. Son entreprise qui est légalement constituée. « Ils ont mis 75 000 FCFA en plus sur mon salaire. Mon agence m’a expliqué que le décret du gouvernement était rétroactif. J’ai donc bénéficié d’un rappel. Désormais j’ai une augmentation de 25 000 FCFA tous les mois », précise-t-il avant de souligner : « Il est vrai que l’argent ne suffit jamais à l’être humain.

 Cependant, les efforts du gouvernement sont à saluer. Je suis soulagé de savoir que je suis payé maintenant à 85 000 FCFA le mois. Grâce à cette augmentation de 25 000 FCFA sur mon salaire, je pourrai mettre un peu d’argent de côté pour investir dans mon projet qui est d’ouvrir une boutique. Rêve que je nourris depuis des années ».

   Contrairement à Sawadogo, Silvana Kouassi n’a pas bénéficié de la revalorisation salariale. Agent de ménage chez une dame prénommée Giselle, elle révèle : « Je suis payée à 50 000 FCFA le mois. J’ai été envoyée chez ma patronne par une agence de placement de servante ».  Dans cet appartement de 3 pièces situé dans le quartier de Zone 4, Silva Kouassi, s’occupe de la propreté de la maison chez une Marocaine de 35 ans et de ses 2 enfants de 3 et 5 ans.

« Dès 5h 00 du matin, je dois être réveillée afin de balayer la cuisine, le salon ensuite faire un peu de rangement. Quand les enfants se réveillent à 6h, je les aide à prendre leur douche, je les habille, puis les accompagne à leur école dans la commune de Cocody », indique Silvana, morceau de pagne attaché à la hanche et surmontée d’un t-shirt jaune.

    Originaire de la ville de Lakota et âgée de 23 ans, Silvana est arrivée à Abidjan dans le but de réunir de l’argent pour aider ses parents fatigués par le poids de l’âge. « Chaque fin du mois, j’envoie 40 000 FCFA à mes parents pour leurs provisions. Mon père est âgé de 80 ans et ma mère, 70 ans », déclare-t-elle en précisant que son salaire est presque insuffisant.

« J’ai appris que le gouvernement a procédé à la revalorisation du Smig de 60 000 FCFA à 75 000 FCFA. Des amies qui font le même boulot que moi m’en ont parlé. Elles sont payées à 80 000 FCFA. J’espère vraiment que le gouvernement enverra des agents sur le terrain afin qu’ils défendent nos causes pour qu’on soit traités de la même manière », dit la jeune femme, les larmes aux yeux.

   Stéphane Bado, vigile chez M. 1,65 m et teint noir, vit la même situation. Il occupe un poste de vigile de nuit devant la villa duplex de cette dame retraitée depuis 10 ans.

« J’assure la sécurité ici depuis bientôt 6 ans. Je commence le boulot à 18h et je rentre les matins à 6h00. Je passe mes nuits assis au portail de cette grande maison teinte en rouge bordeaux, qui donne dos sur la lagune pour éviter que les intrus n’y pénètrent pour tout dérober. Je suis payé à 60 000 FCFA/mois », affirme-t-il.

 Chez ces petits travailleurs comme chez tant d’autre, la décision gouvernementale n’est pas encore tombée.

 

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