Mis à jour le 2024-01-21 22:13:13
Chercheur au département d´Ethnosociologie de l´Université Félix Houphouët-Boigny, Richard BROU donne son point de vue d´expert sur le phénomène de la mendicité dans la ville d´Abidjan.
Professeur Brou, selon vous, qu’est-ce qui explique le phénomène de la mendicité aux abords des voies d’Abidjan ?
La mendicité est un phénomène social qui se vit partout. Dans les pays du Nord, on parle de clochards et autres. Ici, on les voit surtout au niveau des intersections, à chaque carrefour et devant les édifices religieux. La mendicité fait corps avec ce qui se passe dans la société ivoirienne. A l’origine, il y avait la mendicité formelle que tout le monde connaissait. Aujourd’hui, des formes de type arnaque s’observent. En général, dans certaines sociétés africaines, c’est devenu comme une culture et ça fait partie des habitudes des peuples. Ce qui fait que des enfants sont souvent envoyés dans la rue pour quémander. Donc, c’est devenu un fait social dans certaines localités. Il y a une loi qui condamne la mendicité en Côte d’Ivoire, mais malgré cela, on les voit toujours.
S’il y’a de cette loi, qu’est ce qui est à la base de l’indifférence des autorités compétentes face à cette situation ?
La logique sociale considère la mendicité comme une forme d’expression de la recherche d’aide. C’est cette même logique qui retient les autorités parce que l’autorité étant dans le peuple, elle ne peut pas faire autrement. Réprimander un mendiant, c’est comme bafouer ses droits.
Les religions sont-elles à la base du phénomène ?
La mendicité est proscrite au niveau des religions même si on voit plusieurs mendiants aux entrées des mosquées. L’islam condamne cela, tout comme le christianisme, car les mendiants développent une psychologie qui va à l’encontre des croyances. Comment des personnes qui se disent croyants, ne peuvent pas nous aider ? C’est comme ça qu’ils voient les choses. Ils font ça pour jouer sur la mentalité des croyants.
Quel est l’impact de ce phénomène sur la société ?
La mendicité a des conséquences assez désastreuses et diverses. Concernant le cas des enfants, leur intégrité est mise en cause. Ces enfants sont très vulnérables et le fait qu’ils soient aux abords des carrefours, ils peuvent faire l’objet d’enlèvement avec le phénomène de trafique d’organe. Livrés à eux même, ils n’ont aucune sécurité, leur éducation est mise à l’épreuve. Pour le cas des microbes, certainement ils ont dû passer de mendiants à délinquants. S’ils quémandent et ne gagnent rien, ils usent d’autres moyens, la force.